Il en va de l'approche de la retraite
comme des grandes expéditions maritimes...
Ne
manquez surtout pas de lire (ou de relire) Rouge Brésil, admirable
récit historique de Jean-Christophe Rufin, car il en va de
l'approche de la retraite comme des grandes expéditions maritimes
d'autrefois. La haute mer laisse au voyageur tout loisir pour
fantasmer, pour idéaliser sa future vie à terre et pour concocter
des projets mirobolants. Cela ne résiste hélas jamais au fameux cri
de la vigie : « Terre ! » A cet instant, la terre n'est qu'une
ombre subtile qui souligne l'horizon, imperceptiblement. Ce tout
symbolique présage suffit pourtant à faire basculer le navigateur
du rêve à la réalité, brutalement. Il va lui falloir prendre pied
sur une terre inconnue.
Entrer
dans le millésime de la retraite et franchir le seuil des J-100
jours aura été mon cri de la vigie. Tout
au long de ma croisière hauturière – entendre depuis que je me
suis embarqué à destination de la retraite – je me suis
représenté l'atterrissage – la retraite – comme un grand
soleil qui inaugurerait une vie professionnelle nouvelle et enfin
réussie. J'ai élaboré de doctes business plans pour prendre
enfin ma revanche sur la vie. Mais voilà qu'au pied du mur,
l'énergie me manque. C'est que je n'avais pas suffisamment médité
l'expérience des explorateurs. Avant de songer à monter une
expédition de quelque envergure à l'intérieur des terres, ils se
dotent toujours d'une base de vie, d'un cantonnement, voire d'un camp
retranché. J'ai commis l'erreur de sauter cette étape. Peut-être
mes projets n'étaient-ils pas, par nature, trop ambitieux mais ils
étaient certainement très prématurés. Je n'ai certes pas trop à
me préoccuper des vivres, ni de l'eau douce, ni même (encore
que...) d'une protection contre d'éventuels assaillants, bêtes
sauvages ou indigènes hostiles. Cependant, même si j'évolue dans
un monde d'un autre type, l'analogie coloniale reste féconde. Elle
mérite d'être gardée à l'esprit pour guider mon action.
Je
livre ici le fruit de mes premières élucubrations.
AVANT
Précaution
élémentaire : j'ai pris soin de rassembler mes relations
professionnelles autour d'un compte LinkedIn. J'ignore si j'en
aurai besoin ou non, mais ce réseau fait maintenant partie de mon
arsenal. Une fois à la retraite, je n'aurais sûrement pas été en
capacité de le constituer. Il fallait le faire tant que je
bénéficiais encore d'une identité professionnelle présentable.
C'est facile, c'est gratuit et cela permet de rester crédible
au-delà de la retraite. Ne pas oublier : c'est le service minimum du
community management.
PENDANT
Entre
mon ancienne vie et ma nouvelle vie, j'interposerai, si possible,
deux semaines au bord de la mer en guise de phase transitoire.
APRES
Je
veillerai à ne pas sombrer dans l'inertie, la procrastination, ni
l'oisiveté afin de me prémunir d'une déqualification
(disqualification ?) prématurée mais je veillerai aussi à ménager
mes forces. J'éviterai de prendre des engagements inconsidérés et
prématurés. Je pratiquerai une saine gestion de mon temps : voir J-211 – Le temps passe....
Je
prendrai le temps d'organiser mon espace. C'est l'un de mes plus gros
soucis : où donc me réfugier lorsque j'aurai perdu la jouissance du
bureau que mon employeur met aujourd'hui si obligeamment à ma
disposition ? Nous sommes trop petitement logés pour que je puisse
accaparer une pièce entière pour mon usage personnel. Ce n'est pas si
grave. L'aménagement astucieux des petits voiliers habitables ou
encore celui des wagons-lits montrent qu'il doit bien y avoir une
solution.
Je
prendrai le temps d'organiser mon environnement numérique. Cette
préoccupation, que l'on pourrait croire subalterne, est en réalité
très importante. Aucun projet ne peut être conduit sereinement sans un
système informatique fiable, des données sécurisées et une
ergonomie conviviale. C'est pourquoi, dans toute la mesure du
possible, je me démarquerai des produits Microsoft. Cette société
n’innove plus aujourd'hui en effet que pour emmerder ses utilisateurs
captifs !
PLUSIEURS
MOIS PLUS TARD
Lorsque
tout cela sera en place, alors seulement, envisagerai-je peut-être
enfin des projets plus sérieux, des expéditions exploratoires à
l'intérieur des terres inconnues.
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Précision
:
Les
visiteurs les plus assidus de ce blog n'ont pas manqué de remarquer
que ma date de départ à la retraite avait été avancée de
quelques jours. Ceci est dû à la complexité du calcul de mes
droits à congés.
De nouveaux recalages sont encore susceptibles d'intervenir d'ici le jour J.